Les Traces de L’Info
BOGHE ET SON HISTOIRE (du prof à la retraite
Amadou Oumar Dia) (première partie)
La Ville de Boghé,
chef- lieu de la Moughata(Préfecture)
et de la commune de même nom, est située à prés de 320 Km au Sud-est de Nouakchott, sur la rive droite du fleuve
Sénégal, dans la partie Sud de la Wilaya
(région) du Brakna.
Elle se
compose de trois(3) quartiers appelés en Pulaar
(fulfulde) BOGGE-Dow (en dow en Pulaar signifie haut, expression
équivalente à « le haut de
Boghé »), NOOLI (nioli), et Bogge- Les (prononcez ‘less’, c’est-à-dire en Pulaar, expression
équivalente à « le bas de Boghé »).
La ville de Boghé est comme sous deux Noms, Dubaango(Doubango) et Boggee :
Dubaango : la tradition orale locale (ancienne et datée) retient que c’est
le nommé Dubaango Bellal Demmba Baawuura
Aali Paate qui donna son nom à la butte de sable(Tulde) et aux deux villages qui y
étaient implantés : à l’Ouest, Dubaango,
ancien site de Bogge-dow, aujourd’hui disparu ; à l’Est, Tulde-Dubaango.
Boggee : dans le quartier de Bogge-dow, le Baobab (Adansonia digitata, bokki
en Pulaar) poussait en abondance. Les habitants du village allaient cueillir
(boggude) des fruits du baobab pour leur consommation, et enlever les écorces
de l’arbre pour en faire des cordes (boggi).
Le Nom de Bogge serait une altération du mot bogge (cueillettes des fruits de Baobab) ; les autorités coloniales françaises qui dominaient
le pays jusqu’en 1960 l’ont
transcrit Boghé.
BOGHE TELLE QU’ELLE FUT.
La ville de Boghé
est au centre de la Zone traditionnelle dénommée la province Halaybe (située à cheval sur les deux rives du fleuve Sénégal et comprenant plus d’une quarantaine de villages), partie
intégrante du Fuuta Tooro
aujourd’hui partagée entre Mauritanie et
Sénégal. De part sa position géographique dans la moyenne vallée du fleuve
Sénégal, à mis chemin entre le delta et le haut fleuve, de part sa
fonction de carrefour ou de relais des voies de communication fluviale et
terrestres entre, d’une part, le Sud, le centre et l’est Mauritaniens et,
d’autre part, le nord du Sénégal (l’ile
Amorphil appelée : Hakkunde
Maaje « entre les fleuves », Boghé et ses environs ont
toujours été un centre agro-pastoral, un
centre commercial, et restent un véritable lieu de contacts, de brassages des
peuples, de langues et de cultures
. La ville de Boghé fut surtout connue comme :
un centre culturel de notoriété
internationale, des centaines d’écoles
coraniques, des Mahadras étaient recensées à Boghé et dans les villages
environnants. La plus importante et qui contribua
au rayonnement culturel de la ville et à la formation de plusieurs marabouts de
vallées du fleuve Sénégal fut
incontestablement l’université plus
connue sous le nom de Dudal Galle
Saakoobe créée en 1950.
En raison des compétences et des qualités de son fondateur, Ceerno Aamadou Moktaar Saako (1867/70-1934), qui fut également Cadi
de Boghé de 1905 à sa mort en 1934, cette université était appréciée de tout le
monde et attirait des étudiants de tous les coins du pays et même de la sous- région.
L’école primaire de Boghé : une des premières en Mauritanie fut
créée en 1908.
Mais, elle
ne fut réellement opérationnelle qu’en 1921-1922,
grâce à l’œuvre du directeur africain qui la dirigea de 1922 à 1952, le Saint louisien Ndiawar Sarr.
Cette école
a été une véritable pépinière de cadres
pour la Mauritanie indépendante.
Les activités culturelles et
sportives telles que
les cours de vacances, le théâtre, la musique, le basket ball, etc., les
travaux d’utilité publique (investissements humains) y étaient régulièrement
organisés. Ces activités retenaient si bien l’attention des jeunes de la ville que rares étaient les élèves ou étudiants qui
passaient leurs vacances ailleurs à Boghé.
Un centre de recherches et de
formation vétérinaires :
pendant des décennies et jusqu’à
l’indépendance de la Mauritanie, et plus particulièrement entre les deux
guerres mondiales, Boghé a abrité
l’un des deux centres sous- régionaux africains chargés de la recherche, de la préparation de sérums et de vaccins, et enfin de la formation du personnel
vétérinaire de toute l’Afrique occidentale(
le second centre était localisé à
Dogondoutchi, au Niger ; les Abattoirs
de Boghé, en relation avec ce centre, préparaient les viandes exportées
vers la France, surtout durant les périodes des guerres mondiales.
Un centre de Recherche Agricoles : en 1910 un
jardin d’essai a été créé à Boghé.
Longtemps entretenu par les divers résidents de la subdivision qui se sont
succédés dans la ville jusqu’à à l’indépendance du pays, ce jardin et les
nombreux arbres flamboyants « aux grappes de feu »plantés sur le
pont-digue, tout autour des digues et dans les rues et édifices publics
contribuèrent à créer dans la ville un environnement ‘’ beau’’ et ‘’gai’’ comme
le disaient certains poètes ou intellectuels natifs ou non de la ville.
Le secteur agricole de la ville
de Boghé qui s’intéressa depuis 1911 à la culture du
riz sauvage qui était assez répondu dans la région de Boghé, eut la lourde
tache d’introduire la culture du riz ’’ industriel’’
en Mauritanie, à partir de 1965 : les premiers essais pilotes eurent lieu
sous sa conduite à Dar El Barka et à
Bakaw, Weending localités situées toutes à l’époque dans la
Subdivision de Boghé.
Une
ville en déclin :
la ville de Boghé n’a pas beaucoup évolué durant les deux premières décennies
qui suivirent l’indépendance du pays.
Bien qu’elle demeurât pendant longtemps le
chef- lieu d’une des subdivisions les plus peuplées du pays (administrant la zone allant de Dar El Barka à Mbagne), elle resta sans
infrastructures économiques et autres. Celles qui existaient déjà furent
négligées, détruites et tombèrent en ruine : le dispensaire, le centre d’élevage,
écoles primaires, le jardin d’essai, les archives administratives, etc.
A cela
s’ajoute l’effet négatif des dissensions ou divisions internes des politiciens
locaux. La ville a donc connu une longue période de déclin. Cependant, les
activités culturelles y furent maintenues par la jeunesse.
Les traces de l’info Diop
Mohamedou Abou dit HBodiel (Document du Prof à la retraite
Amadou Oumar Dia en 2012)