jeudi 30 mars 2017

oui à l'abandon de l'exicision TOSTAN Mauritanie declaration de thienel

oui à l'abandon de l'exicision TOSTAN Mauritanie declaration de thienel

la 3e cérémonie de déclaration publique d’abandon de l’excision faite par 77 communautés bénéficiaires directs ou indirects du projet « renforcement des capacités des communautés mauritaniennes pour une meilleure protection des enfants », exécuté depuis 2013 par l’ONG Tostan, en partenariat avec l’UNICEF et le gouvernement mauritanien.

La cérémonie a été rehaussée par la présence d’un Responsable de Tostan International M. Malik Ka, de l’imam Hademine O/ Salek de l’Association des Ulémas, de la Représentante de l’UNICEF, Mme Fatma Saïd Ahmed. Les notables, élus et guides religieux du terroir sont également venus assister à cet évènement qui vient couronner trois années d’exécution du programme de cette ONG internationale en Mauritanie.

Les populations de Thiénel et environs ont répondu massivement à l’appel contribuant ainsi à donner à l’évènement tout l’éclat qu’il mérite. Défilé, Chants et danses folkloriques au rythme des guitares et des tam-tams ont accompagné les invités avant, pendant et après la cérémonie officielle.

La veille, les hôtes avaient eu droit à une soirée artistique et culturelle qui a mis en relief toutes les potentialités de cette région qui, de par sa diversité ethnique, apparaît comme une véritable Mauritanie en miniature. Le superviseur de la zone Boghé /Dar El Barka et la coordinatrice du CGC de Thiénel, Mme Aïssata Samba Mbodj ont mis les bouchées doubles pour assurer à cet évènement un éclatant succès. Sur les banderoles accrochées sur tous les coins du village, on pouvait lire : « Les communautés du Brakna bénéficiaires du programme de Tostan/UNICEF/MASEF renoncent catégoriquement à l’excision » ou encore « La tolérance zéro pour l’excision ».

Souhaitant la bienvenue aux participants après la lecture de quelques versets coraniques, le maire de la commune de Boghé, M. Dia Hamady Hachimiou a exprimé toute sa gratitude à Tostan et à ses partenaires pour le choix porté sur sa commune pour accueillir ce grand évènement. « Le choix de Thiénel n’est pas fortuit, il consacre l’engagement sans failles des communautés de ce village dans la lutte contre la misère et les tares sociales », a-t-il dit. L’édile a ensuite loué le programme exécuté par Tostan « qui a contribué largement au recul de l’ignorance mais aussi à la consolidation de l’unité nationale ».

Prenant la parole à son tour, le coordinateur national de Tostan en Mauritanie, M. Mamadou Baba Aw, a d’abord rappelé que « Tostan international a initié un projet sous-régional pour un changement générationnel en trois ans afin d’instaurer un mouvement historique à grande échelle pour l’abandon des pratiques néfastes ».

« C’est dans ce cadre que nous sommes parvenus aujourd’hui avec toutes les forces réunies autour de ce projet d’atteindre l’un de ses objectifs les plus attendus à savoir l’organisation d’une déclaration publique d’abandon de l’excision par 77 communautés issues toutes de la région du Brakna », a-t-il poursuivi.

Ensuite, M. Aw a indiqué que « pendant ces trois années de mise en œuvre de ce programme, 47 communautés ont été adoptées et sensibilisées sur les droits humains et les méfaits de l’excision, plus de 90000 personnes ont été touchées, toutes sont aussi convaincues et engagées dans la promotion de l’excision. Ce qui a facilité cette 3e déclaration qui vient après celles de Mbagne en 2010 et Aleg en 2013 ». Avant de terminer, le Coordinateur a vivement remercié le gouvernement de la RIM et l’UNICEF pour leur soutien constant dans la mise en œuvre du programme.

Quant à la Représentante de l’UNICEF, Mme Fatma Saïd Ahmed, elle s’est dite honorée de prendre part à cette cérémonie de déclaration publique d’abandon des MGF qui est « un des résultats attendus du projet après 2 années de mise en œuvre d’un paquet d’activités orientées vers toutes les parties prenantes allant de l’identification des problématiques au changement de comportement par une approche holistique, en passant par le renforcement des capacités, la sensibilisation et l’information ».

Poursuivant, la responsable de l’UNICEF a indiqué que « les déclarations des communautés d’Aleg, Maghta Lahjar, Boghé, Bababé et Mbagne témoignent de leur ferme engagement à lever le défi de réduire le taux de prévalence de cette pratique dans le Brakna qui touche 46% des filles de 0-14 ans et 62,8%des 15-49 ans, selon les résultats de l’enquête MICS 2015 ».

Elle s’est ensuite déclarée convaincue que cette déclaration « vient conforter les efforts du gouvernement mauritanien pour la promotion de l’abandon des MGF incriminées par l’article 12 de l’Ordonnance portant Protection Pénale de l’Enfant et le Code de Statut Personnel ». Avant de terminer, elle a réitéré « l’engagement des agences UNICEF et UNFPA à poursuivre les efforts pour accompagner le gouvernement et les autres partenaires dans la mise en œuvre de ces programmes ».

Prenant la parole à son tour, M. Ahmed Salem O/ Bouboutt, Conseiller technique du MASEF chargé de la promotion féminine et du genre, a d’abord précisé que cette activité répond aux orientations du Président de la République, Son Excellence Mohamed O/ Abdel Aziz exécutées par le gouvernement du Premier ministre, Yahya O/ Hademine qui accorde une importance particulière à la lutte contre les formes de discrimination à l’égard des couches défavorisées.

« C’est dans ce cadre, a-t-il dit, que le département des affaires sociales de l’enfance et de la famille a mis en œuvre une stratégie nationale de promotion de l’abandon de la pratique des MGF, en collaboration avec ses partenaires, l’UNFPA et l’UNICEF ».

Parmi les actions menées par son département dans ce domaine, M. Bouboutt cite notamment l’organisation de campagnes de sensibilisation qui ont abouti jusque-là à 60 déclarations publiques et volontaires d’abandon de l’excision au niveau des 7 wilayas les plus touchées que sont les deux Hodhs, l’Assaba, le Tagant, le Brakna, le Gorgol et le Guidimakha. Ce qui a permis de réduire le taux de prévalence qui est passé ainsi de 72% en 2007 à 66% en 2015. Enfin, le responsable du MASEF a remercié l’ONG Tostan et ses partenaires pour l’organisation de cette déclaration qui vient appuyer les efforts du MASEF.

Après les discours des officiels, le Chef du village, le Coordinateur du Comité de pilotage et la coordinatrice du CGC, respectivement MM. Boye Amadou Moussa, l’ex-colonel Lô Baïdy et Mme Aïssata Mbodj, ont réitéré « l’engagement ferme et sans équivoque des communautés d’accompagner Tostan jusqu’à l’abandon total de ces pratiques néfastes chez la femme » avant de louer « le rôle déterminant que joue cet organisme dans le changement des mentalités et pour le développement local particulièrement par l’alphabétisation, la sensibilisation et le financement de microcrédits ».

Quant au médecin-chef de Boghé, Dr Bâ Kassoum, il a au nom du DRASS, exprimé sa gratitude à Tostan dont le travail se recoupe avec la mission des services de santé publique.

Enfin, les imams Hademine O/ Saleck et Boye Abou Bacry Alassane ont rappelé que « l’Islam est une religion qui accorde une importance particulière aux droits humains. Il prohibe toute pratique qui comporte des effets néfastes sur la santé humaine. « Le fidèle peut être dispensé de certaines pratiques religieuses obligatoires comme le jeûne ou l’ablution s’il s’avère qu’elles comportent des risques pour sa santé », ont-ils rappelé avant de dire que « l’excision est une pratique traditionnelle qui ne repose sur aucun texte, ni du Coran, ni des Hadiths » !

La lecture du texte de la déclaration en arabe, en pulaar et en français respectivement par Mariam Ndiaye, Aïssata Mamadou Bâ et Hadjiratou Baïdy Lô a été le point d’orgue de cette journée historique. Cette déclaration stipule : « Nous, les représentants de 77 communautés pulaar et Hassanya des départements de Boghé, Bababé, Mbagne, Aleg et Maghta Lahjar réunis ce mardi 20 décembre 2016 à Thienel, prenons l’engagement solennel en toute connaissance de cause, d’abandonner la pratique de l’excision et des mariages précoces des filles ».

Pour les signataires de cette déclaration, « cette décision historique qui vise le renforcement du Mouvement National pour la promotion des droits humains en Mauritanie, en Afrique et partout dans le monde, s’inscrit dans le cadre des initiatives communautaires nées d’un programme d’éducation de base de Tostan en partenariat avec le gouvernement de la RIM et l’UNICEF depuis 2013 et renforcé par des activités de sensibilisation et de mobilisation sociale ».

Après cette lecture solennelle, le Représentant de Tostan international, Malik Ka a prononcé le discours de clôture de cette cérémonie grandiose. Pour M. Ka, « cette déclaration constitue un moment fort de plaidoyer en vue d’améliorer l’environnement législatif et réglementaire de la pratique de l’excision qui est une atteinte à la dignité humaine en général et à celle des femmes et des enfants en particulier ».

Pour étayer son argumentaire, le responsable de Tostan révèle que 3 millions de femmes et de filles sont victimes des MGF chaque année à travers le monde. « Ces pratiques compromettent non seulement la dignité mais aussi et surtout la santé car les recherches ont montré que les femmes affectées par l’excision sont nettement susceptibles d’avoir une césarienne ou de développer des complications pendant t après l’accouchement avec risques de fistule », a-t-il encore clamé avant d’appeler à la mobilisation de tous pour éradiquer ce phénomène.

Notons que cette cérémonie historique avait été précédée lundi à Cheguer (Aleg) par un grand panel organisé à l’intention des journalistes et des bénéficiaires. Pour les responsables de Tostan, « cet exercice permet aux journalistes et à travers eux tous les participants d’évaluer l’impact du programme de cet organisme dans le changement des comportements dont notamment l’abandon de l’excision ».

Ce fut l’occasion pour les acteurs et les bénéficiaires du projet d’exprimer leur reconnaissance à Tostan « dont l’action a eu un impact positif dans le changement des mentalités et l’abandon de pratiques néfastes telles que l’excision, les mariages précoces, le non-respect des règles élémentaires d’hygiène, les violences contre les femmes entre autres ». Ils ont unanimement salué les efforts inlassables menés depuis 2007 par Messieurs Mamadou Aw, Massar Camara et leurs collaborateurs pour la mise en œuvre de ce programme.

Cette 3e déclaration publique d’abandon de l’excision en Mauritanie est l’aboutissement d’un programme triennal intitulé « renforcement des capacités des communautés mauritaniennes pour une meilleure protection des enfants » exécuté par Tostan, en partenariat avec l’UNICEF et le MASEF dans 30 communautés du Brakna. Il a comporté divers volets : Kobi 1 (démocratie, droits humains et processus de résolution des conflits), Kobi 2 (santé et hygiène), Awdé (lecture, écriture et calcul) en plus d’un module portant sur les techniques d’utilisation du SMS texting.

Tous les acteurs (superviseurs, facilitateurs, apprenants, élus, leaders d’opinion) plaident en faveur de la prolongation et de l’extension de ce projet qui a incontestablement contribué à l’éveil des consciences par son approche à la fois pédagogique et holistique. Pourvu que cet appel soit entendu par les plus hautes autorités de notre pays qui ont inscrit le développement communautaire parmi leurs priorités.


DIOP MOHAMEDOU ABOU   Hebdomadaire- Mauritanoix